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Selfie, marry me

Le 14/05/2015

Selfie, tu répondais au nom d’autoportrait, les gens du coin ne cessaient de te déformer et le néologisme a fini par l’emporter. C’est à cause de toi que je ne sais plus sur quel profil poser.

Selfie, selfie, dis-moi qui est la plus belle ? Que dans ton reflet à jamais je demeure immortelle. Promenons-nous dans le smartphone, le créateur de la virtualité aux multiples et complaisants pêchés. Pendant que le code n’y est pas, admirez dont le plus intelligent de mes jolis airs béats.

Selfie selfie, capture-moi, qui suis la plus belle. Etait-ce bien toi qui d’Icare as brûlé les ailes ? Narcisse s’est-il noyé en tombant dans les limbes du monde digitalisé ? Es-tu celui qui as donné un sens aux journées des plus insignifiantes personnalités ?

Selfie, selfie, éclaire mon teint diaphane et rends-moi photogéniquement sculpturale. Si tes filtres me le permettent, je retoucherais mon air de lendemain de fête, pour faire chavirer mes amants virtuellement trop bêtes.

Selfie, selfie, laisse-moi exprimer, laisse-moi m’exposer, démontrer que l’esprit ne saurait primer, que la société est plus belle en images, fais-moi apparaître tel un mirage et disparaître dans le plus gaussien des sillages. Braver la nudité et tourner en Aphrodite connectée les clichés les plus nus parmi ceux des plus habillées.

Laisse-moi défier Morphée en me jetant dans les bras de l’internaute affûté, prouver au monde que les mots sont de trop et les visuels dix fois plus impactants qu’un simple phrasé. Laisse-moi redéfinir l’esthétisme, acquérir la célébrité instantanée, me faire aduler, vénérer, dès lors que je programme le filtre des défauts supprimés.

Selfie selfie, es-tu là ? Sans toi je n’ai plus d’existence virale, plus de réputation online gravée dans les annales. Peu m’importe si tu me blesses, si on te vole, tant que les j’aime inonderont mes matinées.

Selfie, si je devais choisir entre toi et l’esprit, je n’hésiterai pas une seule seconde. Dans une société aussi immonde, l’artifice est ce que j’ai de plus cher au monde. Mon esprit est à vendre pour une poignée de follows gagnés. Je veux être image, intemporalité, beauté aux différents clichés.

Les chimères d’Homère et le temps perdu, je les réinventerai, je les retrouverai à travers les codes de la modernité. De Vénus à Cruella, laisse-moi être la nouvelle Nabilla.

Selfie, laisse-moi me découvrir, promouvoir mon corps sain, oscillant entre l’ado ingénue et puis la putain. Devenir pirate, ou reine des mers, qu’importe si l’on me hack pour toi je n’ai aucun mystère.

Ne me traite pas d’égocentrique alors que je suis une muse, laisse-moi jouer le rôle du modèle numérique puisque je te dis que je m’amuse. Ne romps pas notre accord de confidentialité. Notre clause de mon existence dans la plus numérique de toutes ces sociétés. D’Insterdam à Twitturquie, je naviguerais dans les joies de la perfide photographie.

Mes clichés n’auront aucun égal, mon compte n’aura jamais d’égo. Qu’importe si tu me traites de génération 2.0.

Selfie

La satire marketing des objets con.etc

Le 11/05/2015

Connectez-vous, connectez-vous, abrutissez-vous ! Dans l'ère de l'intelligence programmée, vous n'en deviendrez que davantage smart ! Faites vous assister pour dessiner ce à quoi nous assistons. Le 3.0 c'était hier, si vous êtes dépassés, vous finirez en enfer. Avec R2D2 qui y brûle depuis qu'il est devenu aussi obsolète que la 3G.

Objets concoctés, objets concordants, ils vous mesurent, vous pèsent, évaluent votre respiration, votre transpiration et votre taux de particules dans le sang. Porteur de VIH ? Risque cardiaque trop élevé ? Passez sous l'oeil du big brother 4.0, le Dieu du big data, qui vous révèlera si vous êtes une grosse loque, un individu nauséabond, une brune un peu trop blonde, une femme enceinte un peu trop enceinte ou un hipster pas assez branché.

Faites des marches, faites des pas, de géant pour l'humanité. Faites un geste, tendez la main, et votre ligne de vie n'aura plus aucun secret, plus de trace de vieillesse, ni d'obsolescence.

Vous êtes nul au lit, vous ronflez en dormant ? Entraînez vous avec un bracelet Pornhub pour durer plus longtemps. Vous ne savez pas cuisiner ? Chaque fois vous faites tout carboniser ? Branchez Maïté sur l'écran de votre évier et devenez le beauf gastronome qui sommeillait discrètement en vous jusqu'à l'apparition du révélateur de talent programmé.

Branchez votre cervelle, augmentez votre QI, espionnez votre voisin avec un drone invisible et malin. Quittez votre imagination et remplacez là par votre Ipad, avec ça plus de problèmes de batterie, de blague foireuse ou de manque d'amis.

Révélez-vous, connectez-vous. Devenez objet et retranchez-vous sur le petit nuage. Le cloud de la vitesse, le cloud de la finesse, qui finira peut-être par vous perdre, à force de vitesse, créatrice d'un surplus d'ivresse.

Obj co

 

Société émoti-conne

Le 11/05/2015

Au risque de passer pour une vieille réac, la société de l'émôticone, je n'y adhère que moyennement. Oui, clairement, ça m'embête de ponctuer une phrase par un sourire alors que tout ce que je voulais c'était y mettre un point. Et entre nous, ne faites pas comme s'il n'y avait pas 500 interprétations possibles pour un smiley sourire : l'amour, l'hypocrisie, l'ennui, l'ironie, la fourberie, la perversion, la moquerie, le machiavélisme (tendance parano vous dites ?), la blague, la joie. Bref, ça fait déjà 10. Pour un simple message avec 30 significations possibles, on se retrouve avec le double d'interprétations, le triple d'ambiguité et le quadruple de confusion. Si, si.

Les smileys à gogo c'est la permission de sourire tout le temps ? Adieu la mauvaise humeur, le lunatisme, les plaintes et les coups de gueule ambulants ? Comment voulez-vous que la mode et les défilés ne fassent pas banqueroute ? ( Et même les français tiens.)

Le smiley, c'est la déshumanisation. Perso, je ne me suis jamais identifiée à ce BN puéril découpé en rondelles. Et puis c'est la régression. Franchement vos parents ou votre patron de 50 ans et plus qui vous en glissent un par-ci par-là ne perdent-ils pas en crédibilité ? Vous visualisez votre conjoint en colère vous mettre un smiley énervé ? Votre ex-petite copine larguée sauvagement perdre la once de dignité qui lui reste (si tant est qu'elle en ait eu une) pour vous envoyer un bonhomme triste ou pire encore, un broken heart ?

Et ces pauvres enfants dont les mains ont été amputées et rafistolées avec des tablettes, ces pauvres chatons qui n'ont jamais perçu la différence entre les verbes être et aîtres, ces bouts de chous qui ne peuvent pas aligner trois mots sans qu'on les pense atteints de dyslexie, vous les imaginez jouer au rébus toute la journée et faire des fautes de smileys ? Oui car :( ne s'écrit pas pareil que :'( et non ce n'est pas la même conjugaison. Puis bien sûr qu'il y a des irréguliers. M'enfin, dans quelle langue suce-t-on ?

Les smileys, c'est la fin d'un monde, le monde des visages, de l'exposition et du corps humain, adieu les duck faces et les selfies poitrine. Salut Kim Kardachiante, bonjour bonhomme Michelin (quelle déception quant au placement du silicone et à la proportion des formes :( )

C'est aussi le Smiley coeur, l'amour avec un grand A affiché partout et pour tout le monde. Pour le chien, la voisine, mamie alsacienne, la maîtresse de CE2, B2OBA, la-connasse-que-tu-peux-pas-blairer-mais-avec-qui-t'es-coincé(e). Impossible de déferler sa haine, d'avouer publiquement aux gens que non tu ne les aimes pas et que oui tu les méprises profondément. Pays de bisounours 3.0 nous voilà.

Bref, salut :)

Smilye

L'amour inoubliable, l'amour inoublié : l'ex aimé(e)

Le 11/05/2015

C'est cette personne que vous avez dans la peau. Malgré les jours et les années, les relations et les ex par milliers, malgré le nombre de rencontres annuelles, la débauche, la concentration et les coups de foudre instantanés, cet "amour" vécu, rêvé et bien terminé vous tenaille encore les entrailles.

Vous avez tendance à l'idolâtrer. Comme pour le culte du passé et son c'était mieux avant, pour vous il y aura toujours ce c'était mieux pendant.

Durant vos grandes crises de larmes et vos plus beaux moments de joie, incessamment vous vous posez la question "qu'aurait-il/elle dit à ce moment là ?"

Comme un(e) amoureu(x)se transi(e) vous savez que vous avez perdu toute rationnalité, que vous êtes proche de l'ado en crise existentielle qui cherche à aimer tout ce qu'il a sous les yeux qui pourrait lui procurer le sentiment d'exister. Au point où vous en êtes vous n'êtes plus seulement parano mais carrément utopiste.

Vous vous forcez à penser que cette histoire aurait pu/dû durer, que c'est une histoire inoubliable. Vous revivez les moments passés ensemble avec plus d'intensité que lorsque vous les avez réellement vécus. Vous comparez la personne qui partage votre vie à cette convoitise déraisonnée et trouvez mille qualités à l'ex adoré(e).

Une ancienne dispute devient une broutille d'enfantillage, une tromperie : un égarement de jeunesse, une maltraitance : c'était votre faute de toute façon vous l'aviez provoqué(e).

En réalité, si cette personne ne partage plus votre vie, c'est parce que vous avez fait un choix. Et probablement le bon. Que vous le regrettiez ou non, quelque chose ou quelqu'un vous a poussé à le faire pour une raison fondée. Si vous vous êtes fait largué(e), je n'ai en réalité plus d'arguments.

Je plaisante. Si vous avez été quitté(e) c'est encore mieux, cela signifie que cette personne était injuste, qu'elle ne vous aimait pas ou avait une raison plus forte que l'amour pour mettre un terme à votre relation (ce qui la classe automatiquement dans la catégorie des mauvaises personnes).

L'être rêvé est bien souvent comme le fameux prince charmant/ou la bonnasse intelligente à gros seins : ils n'existent pas. Ou bien c'est un être qui ne possède pas toutes les qualités pour que vos deux coeurs et corps soient en osmose. A cause de lui votre coeur saigne et n'est absolument pas épanoui, vous avez un regret, une frustration qui dans la plupart des cas ne sera jamais comblée. Est-ce être digne d'amour de faire souffrir un petit coeur d'humain en gélatine toute molle ? Non.

En attendant c'est toujours sympa de se voiler la face.

Et puis finalement, n'éprouveriez-vous pas les symptômes du fantasme ?

L homme ideal

Une histoire de rencard manqué

Le 11/05/2015

Par un beau vendredi soir où l'on sentait les prémices d'un week-end riche en débauche, glandouille ou en travail assidû :

Il est arrivé tel un preux chevalier dans sa Citroën marron grisé. Jean repassé, cheveux relevés, faux gentleman prémédité. Elle en dentelle, regard mortel, bottes de rockeuses et mascara outrageux. Il a chaviré sans même un baiser. Et puis quelques mots, bataille d'égos. Complicité feinte, hypocrisie de l'empressement. Calcul, faux romantisme, comme pour coïncider avec cette société de l'urgence où les hommes se consomment, les relations se consument et le mariage se finit par un mot en langage sms, via un texto, un réseau ou une appli version premium pour avoir l'avantage de choisir ce qui ne se choisit pas.

De la tendresse exagérée, ils sont passés à une relation qui perdait peu à peu sa complicité, un peu comme on passe sur Facebook, de marié à fiancé pour en arriver à une relation libre. Se faire passer pour libertin est aussi drôle que les blagues qu'il a sorties ce soir-là. A un moment elle s'est arrêtée de rire, il était en manque de connexion. A son smartphone, à sa smartflamme. Elle lui plaisait, l'instant d'un match-Tinder, d'un switch tactile, ou d'un wizz des années 2000. Mais sans l'option affinités.

Il lui plaisait autant que la dernière mise à jour de son RS préféré, elle aurait préféré que ce rendez-vous soit instantané ou dure 7 secondes, le temps de retirer son doigt pour zapper, faire disparaître l'apparition désagréable d'une image trop imposante, trop impactante et pas assez divertissante.

La prochaine fois il sélectionnera mieux son profil et elle arrêtera d'accepter les rencards d'inconnus. Seulement le problème de ce date, c'est qu'il émanait pour une fois d'un échange spontané, qui avait eu lieu dans la rue.

 

Picto